On peut vivre confortablement en se passant de radiateurs.
Comment? En construisant une maison passive.Ce concept de bâti permet d’économiser un maximum d’énergie. Suivez le guide !
Depuis 2013, tous les logements neufs doivent respecter la RT 2012.Cette réglementation thermique limite la consommation énergétique à50kWh/m² par an. Ce
seuil tient compte du chauffage, de l’eau chaude sanitaire (ECS) et de l’éclairage,mais pas de l’énergie nécessaire aux appareils électroménagers et électriques.
Il est possible de faire nettement mieux en construisant une maison «passive ». On l’appelle ainsi car elle peut se passer de chauffage,du moins sous une forme conventionnelle (chaudière,pompe à chaleur, etc.).
Dans une construction passive, la chaleur produite à l’intérieur (lorsque l’on allume le four,par exemple) et par l’ensoleillement suffit à répondre aux besoins d’apports thermiques. Ceux-ci sont «inférieurs de 90% à ceux d’un bâtiment RT 2012»,souligne Vincent Kempf, maître d’œuvre à Bouxwiller,dans le Bas-Rhin.Dans une maison passive,la consommation de chauffage est inférieure à 15kWh/m2 par an.
Aucune technique de construction n’est imposée. Vous pouvez opter pour une armature en bois, qui permet de monter la maison en quelques jours, ou préférer le traditionnel béton. Pour l’isolation, vous pouvez choisir un matériau biosourcé comme la laine de bois ou la ouate de cellulose. Un produit issu d’une matière première fossile, comme la laine de verre, la laine de roche ou le polyuréthane, est aussi admis.
Une conception bioclimatique
Les maisons passives reposent toutes sur les mêmes concepts :une conception bioclimatique, une isolation et une étanchéité à l’air optimales,une ventilation mécanique contrôlée (VMC)double flux voire,dans les régions les plus chaudes, un puits canadien ou un puits provençal. Ces derniers envoient dans la maison un air préchauffé en hiver et rafraîchi en été, grâce à des canalisations enterrées dans le sol où la température est constante. Avant d’étudier les caractéristiques tech- niques de la maison, il faut commencer par se pencher sur sa conception et son intégration dans son environnement. Elle doit être «bioclimatique ». Sous ce terme, on retrouve, en réalité, un grand nombre de règles de bon sens appliquées depuis long- temps dans les constructions anciennes.
Ainsi,les surfaces vitrées des pièces principales seront majoritairement orientées au sud, afin d’optimiser les apports solaires passifs. «L’hiver, lorsqu’il fait 0°C dehors mais que le soleil tape sur les baies vitrées de ma maison, la température intérieure peut atteindre26°C. Il arrive même que nous soyons obligés d’ouvrir les fenêtres »,sourit Grégoire, qui vit dans une maison passive dans l’Est de la France.
Pour éviter que votre habitation ne se transforme en fournaise l’été, il faut prévoir des protections solaires adaptées et correcte-ment dimensionnées. «Aux traditionnels volets roulants qui,une fois fermés,plongent la pièce dans l’obscurité, préférez des brise-soleil orientables(BSO). Ils préservent des rayons du soleil en laissant passer la lumière », conseille Vincent Kempf. La présence de feuillus autour de la maison permettra, aussi, de garantir une certaine fraîcheur en été,sans vous priver des apports solaires durant l’hiver. Enfin, le bâtiment doit être le plus compact possible–entendez par là,parallélépipédique–pour limiter les déperditions. Cet objectif est plus facilement atteint lorsque les constructions sont mitoyennes.
Une isolation performante
«Isoler correctement une maison revient à poser un gros manteau autour du bâti», résume Nicolas Ribière,président de l’organisme de certification des maisons individuelles Céquami. L’isolation se fait toujours par l’extérieur, pour supprimer la totalité des ponts thermiques,c’est-à-dire les endroits de la construction où la barrière isolante est rompue(balcons,murs de refend…). Pour obtenir les performances requises, il faut prévoir, au moins, 35 cm d’isolant dans les régions océaniques et jusqu’à 45cm dans celles au climat continental.
«Le pouvoir isolant se mesure grâce à son coefficient lambda, exprimé en watt par mètre carré-kelvin.Plus cette valeur est petite,mieux c’est. Par exemple, la paille a un coefficient lambda de 0,07,le polyuréthane de 0,025 et la laine de roche ou de verre de 0,04 », explique Martin Guer,chef de projet bâtiments performants à l’Agence qualité construction (AQC).
Les professionnels conseillent aussi de s’attacher à c eque l’on appelle le déphasage, c’est-à-dire le temps qu’il faut à la chaleur pour pénétrer à l’intérieur de la maison. De cette donnée dépendra votre confort pendant la saison estivale. «Par exemple, en période de températures élevées, le polyuréthane stocke la chaleur pendant 4 à 6heures avant de la restituer dans la maison, alors qu’avec un matériau biosourcé, ce phénomène se produit au bout de 12 à 14heures. Dans le premier cas, la restitution de chaleur sur- vient dans l’après-midi quand la tempéra-ture extérieure est encore très élevée.Dans le second cas, c’est la nuit, quand la maison se rafraîchit, qu’elle se manifeste », explique Vincent Kempf. Une excellente étanchéité à l’air L’autre spécificité de la maison passive est son étanchéité presque totale à l’air.«Lorsque l’on effectue un test d’infiltrométrie, pour mesurer les fuites d’air d’un bâtiment,on s’aperçoit qu’elles représentent l’équivalent d’un ballon de basket dans une construction RT 2012, contre seulement une balle de ping-pong dans une maison passive », souligne
Maxime Brard, promoteur immobilier et fondateur d’Ecolocost, constructeur de mai- sons écologiques. Des infiltrations peuvent exister dans de multiples endroits :jonctions avec les parois, le toit et les planchers,passages de canalisations,de tuyaux de ventilation et de câbles électriques ou ouvertures vers l’extérieur (portes, fenêtres, VMC…). Dans une maison en maçonnerie traditionnelle, les fuites seront évitées par un plafonnage
continu et des raccords minutieux aux fenêtres.Dans une construction e nbois,on instal-lera une membrane étanche, généralement en Polyane, derrière les chevrons dont on calfeutrera tous les raccords avec un adhésif adapté.Outre un gain énergétique, cette étanchéité apporte un surcroît de confort pour les occupants de la maison.«Même par grand vent,il n’y de sensation de filets
d’air », assure Dimitri Molle, fondateur du burea ud’études thermiques Sénova.
En raison de leur grande étanchéité,les maisons passives doivent être très bien ventilées. généralement équipées d’une ventilation double flux à échangeur thermique. Cette technique permet de récupérer la chaleur de l’air qui sort de la maison pour réchauffer l’air neuf qui y entre. Le dispositif peut être inversé pour rafraîchir la maison durant l’été, l’air intérieur étant plus frais que l’air extérieur. Pour être vraiment efficace, la ventilation double flux doit être correctement dimensionnée et régulièrement entre-tenue. «Nous changeons les filtres tous les 6 mois, ce qui nous revient à 150 € par an », témoigne Catherine Perrin-Labeur,architecte DPLG et propriétaire d’une maison labellisée«Passivhaus », près d’Avignon.
«Économies d’énergie ne signifient pas forcément économies financières », tempère Martin Guer. Le surcoût d’une maison économe en énergie oscille entre 10 et 20 %.
Cet écart devrait se réduire, quand les techniques de construction se seront démocratisées. «Avec un kilowattheure d’électricité à 8 centimes, on peut estimer qu’aujourd’hui, il faut un peu plus de 15ans pour amortir une telle maison », calcule Jean-Marc Beyrand, directeur technique chez Maisons Privat, qui vient de réaliser une maison positive et«Passivhaus », aux portes de La Roche-sur-Yon (85). Mais elle offre l’avantage d’être claire, ventilée et très confortable à vivre.«Dans ces constructions, il n’y a pas de courant d’air,pas d’effet de parois froides et l’isolation phonique est excellente », explique Nicolas Ribière.
La maison passive est à la fois un mode de construction et un label–«Bâtiment passif » ou «Passivhaus»–délivré par l’association
La Maison passive
Ses critères techniques n’étant pas exactement les mêmes que ceux de la RT 2012,cela contraint le maître d’ouvrage à faire réaliser deux études : la première pour la RT 2012 et la seconde pour la
Passivhaus; ce qui représente un budget total d’environ 5000 €!
Une floraison de labels
Les labels lancés en mars 2017 par l’association Effinergie s’appuient sur la réglementation thermiqu eexistante.«Comme elle l’avait déjà fait pour le label Bâtiment basse consom-mation, l’association approfondit la réglementation en y intégrant de nouvelles exigences», constate Dimitri Molle.Ainsi,BBC Effinergie 2017,Bepos Effinergie2017 et Bepos+Effiner-gie 2017 ne certifient pas que les bâtiments sont passifs, mais qu’ils consomment 20%d’énergie en moins que ce qu’exige la RT2012.
Les logements estampillés Bepos doivent,en outre, produire plus qu’ils ne consomment, grâce à l’utilisation d’énergies renouvelables (voir ci-contre). Enfin,tous ces labels intègrent la qualité environnementale des matériaux. Autant d’éléments qui anticipent la RT 2020 et la maison du futur !